Entrevue

La pandémie a fait grimper les cas de violence conjugale au Québec

Mis à jour le 11 août 2022
par Johanna Sabys
La pandémie a fait grimper les cas de violence conjugale au Québec

La Dre Mélissa Généreux (Source: Université de Sherbrooke / Michel Caron)

  • Une étude de l’Université de Sherbrooke confirme que les confinements ont eu un impact sur la violence conjugale. En octobre 2021, plus de 3% des Québécoises interrogées affirmaient subir de la violence physique, et plus d’une femme sur 6, une violence psychologique ou verbale.
  • Lors de 4 sondages, entre novembre 2020 et octobre 2021, l’étude a capté les effets des vagues de la pandémie, explique à InfoBref la Dre Mélissa Généreux, professeure en santé communautaire. À l’arrivée du passeport vaccinal, les non-vaccinées ont été beaucoup plus touchées. 

Au Québec, aucune étude ne permet d’avoir un point de comparaison pré-pandémie. 

Mais à l’échelle nationale, en 2019, selon la dernière Enquête sociale générale (ESG), 1,5% des Canadiennes déclaraient avoir vécu de la violence conjugale physique ou sexuelle au cours de l’année précédente.

De nombreuses femmes vivent dans un climat malsain

L’étude de l’Université de Sherbrooke montre que les Québécoises sont nombreuses à avoir subi une forme de violence pendant la pandémie. 

  • Depuis le début de l’année, 26 femmes ont été tuées par leur conjoint. 
  • Mais derrière ces féminicides, souligne la Dre Mélissa Généreux, qui a supervisé l’étude, «on ne savait pas combien de femmes vivaient un quotidien malsain». C’est ce que l’étude a permis de documenter. 

L’impact du passeport vaccinal a pu être mesuré

En octobre 2021, l’écart s’est creusé entre les femmes qui étaient adéquatement vaccinées et celles qui n’avaient pas reçu leurs 2 doses de vaccin anti-Covid. 

  • 4,7% des femmes non adéquatement vaccinées ont affirmé alors qu’elles subissaient de la violence physique, contre 2,8% des femmes vaccinées. 

Le passeport vaccinal a permis d’encourager la vaccination, dit la docteure, mais on sait maintenant qu’il a aussi isolé des femmes qui n’ont pas pu aller chercher de l’aide lors de sorties sociales. 

Ce sont des leçons à retenir avant la prochaine vague.

La Dre Généreux, qui est candidate pour Québec solidaire dans la circonscription de Saint-François, en Estrie, reproche au gouvernement de ne pas avoir profité des accalmies, entre deux vagues d’infections, pour prendre du recul. 

«Aucune gestion de crise n’est parfaite, dit-elle, mais on doit en tirer des leçons et les appliquer.» 

Des mesures ont été prises quand les hôpitaux débordaient, mais le premier ministre ne suivait pas les chiffres des réseaux d’hébergements pour femmes, déplore-t-elle. 

  • «Ils étaient débordés, eux aussi, et ils ont dû refuser beaucoup de demandes.
  • Pour les femmes qui en avaient besoin, c’était pire que d’attraper la Covid.»

La pandémie a été gérée en fonction des données de santé, explique-t-elle, et non sur les données communautaires et sociales. «On connaît moins ce drame-là, mais il est aussi réel que celui vécu dans les hôpitaux.»

Johanna Sabys