Conseil pour vos FINANCES
Les rachats d’actions: opportunité ou piège pour l’investisseur?

[crédit photo: zhang-kaiyv]
Quand une entreprise veut séduire ses actionnaires, elle a plusieurs outils. Le dividende en est un, mais il existe aussi une autre stratégie, parfois plus subtile: le rachat de ses propres actions (buyback).
C’est une pratique courante chez les géants de la bourse, mais pas toujours bien comprise des investisseurs. Alors, faut-il applaudir un rachat d’actions, ou plutôt s’en méfier?
Ce texte a été rédigé par Fabien Major, MBA, CIM, Pl.fin, professionnel de la finance, auteur et chroniqueur.
Qu’est-ce qu’un rachat d’actions (share buyback)?
C’est tout simplement quand une société décide de racheter une partie de ses actions déjà cotées en bourse.
En réduisant le nombre d’actions en circulation, chaque action restante représente une part plus grande du gâteau.
Résultat: de façon mécanique, le bénéfice par action (BPA) augmente, et la valeur boursière peut suivre.
À première vue, cela semble une excellente nouvelle pour les actionnaires: un plus petit nombre de parts, plus de valeur pour chaque part.
Mais la réalité est plus nuancée.
Quand le rachat d’actions est un signal positif
Un buyback peut être perçu comme une preuve de confiance. Par exemple:
L’entreprise croit que son action est sous-évaluée. Elle utilise alors sa trésorerie excédentaire pour miser sur elle-même.
Un rachat peut aussi, sur le plan fiscal, être plus avantageux qu’un dividende pour les actionnaires, puisqu’alors ils n’ont pas à subir d’imposition immédiate.
Les investisseurs apprécient généralement le signal donné par un rachat d’actions, surtout si la société continue en parallèle d’investir dans sa croissance, ses employés et sa recherche.
Des conseils en finances personnelles, investissement, immobilier et consommation? C’est ce que vous offre chaque mois l’infolettre InfoBref Votre argent. Elle est gratuite: inscrivez-vous ici ou en cliquant Infolettres en haut à droite
Quand il faut se méfier d’un rachat d’actions
Attention, tous les buybacks ne sont pas synonymes de bonne santé.
Parfois, l’entreprise n’a plus d’idées de croissance. Elle se contente alors de «gonfler» artificiellement ses ratios financiers.
Pire encore, certaines s’endettent pour financer des rachats d’action. Cela alourdit leur bilan et peut les fragiliser.
Autrement dit, un buyback peut être une manœuvre brillante… ou un maquillage comptable.
Un exemple: Apple, la machine à buybacks
Depuis plus de dix ans, Apple a investi massivement dans le rachat de ses propres actions.
- Rien qu’en mai 2024, elle a annoncé un programme record de 100 milliards $US.
Sur une décennie, Apple a dépensé environ 700 milliards $US en buybacks, réduisant ainsi de 37% le nombre de ses actions en circulation.
Résultat: le bénéfice par action a bondi de près de 60%.
Les actionnaires en ont largement profité: la performance boursière de la société a été bien supérieure à celle du S&P 500.
Dans ce cas, le buyback reflétait une stratégie solide réunissant trois éléments:
- une trésorerie colossale;
- un produit phare (l’iPhone) générant des flux de revenus constants;
- une confiance affirmée dans l’avenir de l’entreprise.
L’essentiel des nouvelles en 5 minutes? C’est ce qu’offre chaque jour l’infolettre InfoBref Matin aux entrepreneur·es, gestionnaires, professionnel·les et investisseur·ses. Essayez-la: inscrivez-vous gratuitement ici ou en cliquant Infolettres en haut à droite
Un contre-exemple: Bed Bath & Beyond
L’histoire de Bed Bath & Beyond illustre la face sombre des buybacks.
Entre 2004 et 2021, la chaîne américaine d’articles pour la maison a dépensé environ 12 milliards $US pour racheter ses propres actions.
Problème: cette stratégie a vidé ses coffres alors que l’entreprise perdait du terrain face au commerce en ligne et à Amazon.
En réduisant ses liquidités, Bed Bath & Beyond a inquiété ses fournisseurs, qui ont ralenti les livraisons.
Les magasins se sont retrouvés avec des rayons clairsemés, les clients sont partis… et l’entreprise a sombré dans la faillite en 2023.
Que doit retenir l’investisseur?
Un rachat d’actions, pris isolément, n’est ni une bonne ni une mauvaise nouvelle. Tout dépend du contexte.
Signal positif si:
- l’entreprise a beaucoup de trésorerie;
- son action semble sous-évaluée;
- elle continue d’investir dans sa croissance.
Signal négatif si:
- le rachat est financé par la dette;
- il remplace les investissements essentiels;
- il survient alors que le modèle d’affaires est en déclin.
Pour l’investisseur débutant, la clé est de ne pas se laisser hypnotiser par l’effet mécanique sur le cours ou le BPA. Il faut toujours se demander:
- L’entreprise rachète-t-elle ses actions parce qu’elle est forte et confiante?
- Ou plutôt parce qu’elle ne sait plus quoi faire d’autre pour plaire à ses actionnaires?
En bourse comme ailleurs, la prudence est mère de sûreté. Un rachat d’actions peut être une musique douce à vos oreilles… ou le chant d’une sirène qui mène droit aux récifs.
Pour recevoir la chronique Conseils pour VOS FINANCES de Fabien Major chaque mois dans votre courriel, abonnez-vous gratuitement à l’infolettre InfoBref Votre argent ici ou en cliquant Infolettres en haut à droite
Fabien Major signe la chronique «Conseils pour vos finances» chaque mois dans l'infolettre InfoBref Votre argent (pour la recevoir gratuitement, abonnez-vous ici).
Vous pouvez aussi consulter une liste de ses meilleures chroniques.