Le MONDE en questions
Conflit entre la Chine et Taïwan: y a-t-il une solution?
(Source: Rovin Ferrer / Unsplash)
- La tension est actuellement très vive entre la Chine et l’île de Taïwan. «Dans un avenir prévisible», Taïwan peut se défendre, avec l’aide des États-Unis, par une «dissuasion conventionnelle», explique à InfoBref Jean-Pierre Cabestan, directeur de recherche au Centre national de recherche scientifique de Paris et professeur de science politique à Hong Kong.
- Mais à terme, selon lui, «la seule solution serait que Taïwan accepte l’existence de deux entités dans l’enveloppe chinoise».
D’où vient le conflit?
Pékin considère l’île comme une province chinoise et espère faire accepter ce statut à Taïwan. La Chine ne reconnaît pas la survie de l’ancienne République de Chine à Taïwan, après la guerre civile chinoise et la fuite sur l’île du gouvernement de l’époque.
- La République populaire de Chine a été fondée sur le continent en 1949.
- De son côté, la République de Chine, qu’on appelle communément Taïwan, continue d’exister depuis cette date de façon officieuse et sans obéir à Pékin.
La Chine aura les moyens d’envahir Taïwan en 2024.
L’armée chinoise est beaucoup plus crédible qu’avant, selon le professeur Cabestan:
- Pékin a renforcé son outil militaire, ses forces maritimes et aériennes.
- D’ici 2024, ou peut-être avant, le pays aura les moyens de reprendre Taïwan en 3 temps, croit-il: «salve de missiles, blocus maritime, puis invasion».
Taïwan ne peut pas se défendre sans l’appui américain.
La présidente de Taïwan Tsai Ing-wen disait encore mercredi à CNN qu’elle fait «confiance» aux États-Unis pour défendre son île face à la Chine.
- Or, le Taiwan Relations Act n’est qu’une loi du Congrès qui prévoit un soutien pour renforcer la défense de Taïwan afin de maintenir la stabilité dans le détroit.
- Ce n’est pas un traité de défense qui obligerait les États-Unis à intervenir en cas de conflit armé.
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Les Américains sont crédibles dans leur dissuasion.
Les Chinois pourraient penser qu’après l’Afghanistan, les États-Unis n’ont plus envie de s’engager, dit Jean-Pierre Cabestan.
- «Mais Taïwan ce n’est pas l’Afghanistan: les Américains y ont des bases et une stratégie de défense.»
- Ce serait difficile pour eux de ne pas intervenir, dit-il.
Les Américains entretiennent «une coopération quotidienne et dense de sécurité avec Taïwan», affirme le professeur.
- On sait qu’ils ont sur place des douzaines d’instructeurs militaires et une base d’entretien des F16 taiwanais, détaille-t-il.
Le risque d’une guerre directe entre la Chine et les États-Unis, deux puissances nucléaires, semblent limités, croit-il.
Mais la Chine s’impatiente:
- Elle a lancé «une guerre psychologique;
- s’adonne à des gesticulations militaires croissantes;
- mène une opération de désinformation; et
- tente de capter les élites de Taïwan».
Le seul moyen de dissuader les Chinois est de maintenir «une défense crédible», soutient le professeur.
- «La Chine doit comprendre que toute aventure militaire aura un coup énorme», souligne-t-il.
- Le futur ambassadeur américain à Pékin, Nicholas Burns, a d’ailleurs affirmé devant le Congrès que la meilleure solution serait de vendre plus d’armes à Taïwan pour renforcer ses défenses et en faire un adversaire coriace.
Les États-Unis auront-ils les moyens de maintenir un rapport de force favorable à Taïwan?
À long terme, ce n’est pas certain, croit le professeur.
- «Les États-Unis risquent de se trouver dans une situation difficile», notamment à cause de la taille de la marine chinoise, de son aviation et de la distance des bases américaines.
- Washington demandera peut-être à Taïwan «d’accepter un compromis».
Ce compromis pourrait être «d’accepter l’existence de deux entités dans l’enveloppe chinoise» – donc, de réintégrer officiellement la Chine, en échange d’un statut particulier.
[Pour aller plus loin: lisez Demain la Chine: démocratie ou dictature? de Jean-Pierre Cabestan, disponible sur Amazon et le site de la librairie Gallimard à Montréal]
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