Analyse POLITIQUE
Les transferts en santé aux provinces deviennent un enjeu électoral
(Image InfoBref/Unsplash)
- Les coûts en santé croissent sans cesse en raison du vieillissement de la population.
- Le gouvernement fédéral doit payer sa juste part, et laisser les provinces administrer leurs régimes de santé selon les besoins de leur population.
La pandémie illustre à quel point les soins de santé sont vitaux. En quelques semaines à peine, la Covid-19 a jeté à terre l’économie mondiale, et elle a mobilisé toutes les énergies pour dresser un mur de résistance sanitaire – qui s’est révélé défaillant à plusieurs égards.
L’actualité nous a rappelé ces derniers jours deux faiblesses parmi plusieurs:
1 – Dépendant des grandes pharmaceutiques dont les installations sont ailleurs dans le monde, le Canada n’a plus la capacité suffisante pour produire des vaccins.
Par chance et à un fort prix (qu’on ignore), le Canada a réussi à tirer son épingle du jeu. Heureusement!
2 – L’organisation des soins étant toujours plus coûteuse, les gouvernements font des choix pour limiter les dépenses à un niveau acceptable.
Au Québec, il en a résulté une centralisation excessive qui a rendu vulnérable le système de soins aux personnes âgées.
Les personnes vivant en CHLSD en ont payé le prix: elles ont été les principales victimes de la pandémie. Durant la première vague, tout près de 70% des victimes de la Covid-19 étaient des pensionnaires de CHSLD, rappelait jeudi la Protectrice du citoyen.
Le dilemme des premiers ministres est toujours financier lorsqu’il s’agit de planifier l’évolution des systèmes de santé.
Au Québec, la Santé accapare la moitié des dépenses de programmes, soit presque 43 milliards $. En moyenne, l’augmentation des dépenses en santé est de 5% par année.
Comme dans les autres provinces, le vieillissement de la population ajoute une pression sur le système de soins: besoin de davantage de personnel soignant, recours inévitable aux nouvelles technologies, nouveaux médicaments performants mais très dispendieux.
Les provinces ont lancé un appel à l’aide à Ottawa.
- Elles estiment que, malgré l’énorme déficit engendré par la pandémie, le gouvernement fédéral dispose d’une plus grande marge de manœuvre financière.
- Elles l’appellent aussi à respecter l’engagement historique pris au moment de créer l’actuel système de santé, universel et gratuit: il devait être financé à parts égales; or, aujourd’hui, Ottawa n’y contribue plus qu’à hauteur de 22%.
Sans surprise, les premiers ministres provinciaux ont reçu jeudi ce qui s’est révélé être une fin de non-recevoir à leur demande de porter la contribution fédérale à 35%.
Justin Trudeau s’est dit disposé à accorder une augmentation dans le sens souhaité.
Mais aussitôt ouverte, il a refermé la porte. Cette discussion aura lieu plus tard… quand la pandémie sera chose du passé.
Au surplus, il laisse entrevoir que, le cas échéant, toute contribution supplémentaire sera assortie de conditions.
Les provinces sont déçues de cette réponse.
Certaines, comme le Québec, y voient un rendez-vous manqué. Elles ont reconnu là le jeu habituel du gouvernement fédéral: se donner du temps pour diviser les provinces en négociant des ententes avec chacune d’entre elles.
Pour contrer Justin Trudeau, les premiers ministres des provinces n’ont maintenant qu’un seul moyen à leur disposition.
Alors que la perspective d’une élection ce printemps se précise, il leur faut, avec l’aide des partis d’opposition, convaincre les Canadiens de l’urgence de renforcer un système de santé devenu vulnérable.
Pour recevoir l’analyse politique de Bernard Descôteaux un samedi sur deux dans votre courriel: abonnez-vous gratuitement ici au bulletin de nouvelles quotidien InfoBref Matin